Notes de l’auteur

Le coup de grâce – outil de prévention du mal-être et des conduites suicidaires

Notes de l’auteur Mélanie Grisvard

Ce projet s’inscrit indéniablement dans une démarche de prévention primaire. Intervenir auprès des jeunes, ainsi qu’auprès des adultes qui les entourent, pour leur donner des outils pour identifier leur propre mal être et/ou ceux de leurs proches,lever les tabous, apprendre à détecter les signaux faibles – ou moins faibles -, envisager des réponses aux questions, informer des ressources de soutien possibles et souhaitables…

Mettre des mots sur les maux : la pièce porte une partie de cette «mission», mais également l’échange entre publics et professionnels qui lui succède et qui permet de créer le climat favorable à la recherche de solution de prévention. Le suicide est la deuxième cause de mortalité en France chez les moins de 25 ans. Au delà des morts avérées, les tentatives ou les comportements suicidaires – qui auront des effets dévastateurs sur le jeune lui-même et sur son entourage – sont légions. Ils sont révélateurs de mal-êtres qu’il est du devoir de notre société d’entendre et de traiter.

Le théâtre, en s’adressant autant à l’affect qu’à l’intellect, rend sensibles les sujets, et mobilise notre intelligence mais aussi nos émotions. L’association du message formel avec les aspects émotionnels permet des prises de conscience authentiques, et une évolution durable des comportements.

A propos des enrôlements sectaires, qui transforment des jeunes en « terroristes », ce qui indéniablement participe des phénomènes de comportement à risques, voici ce que dit e psychiatre Boris Cyrulnik :

… Ces enfants en détresse sont abandonnées. La solution serait de les éduquer, de leur envoyer des gens de culture. Et la culture ne se fait pas par les philosophes, elle se fait par les gens de théâtre, elle se fait par les gens de terrain, qui vont sur le terrain, qui proposent des fictions qui touchent les enfants. C’étaient la fonction du théâtre en Grèce, c‘est à dire que les citoyens ne pouvaient pas quitter le théâtre après la représentation, ils devaient en discuter parce que les comédiens mettaient sur scène les problèmes de la cité. Et la culture ensuite était partagée. Ensuite on faisait intervenir les philosophes, les politiciens, les économistes et ensuite… mais le point de départ c’était les artistes.

TV 7, le 12 janvier 2015

C’est bien dans cette lignée que s’inscrit le projet « Le coup de grâce » . Il est le fruit d’une démarche de longue date : faire du théâtre d’intervention, au service de la prévention, de l’action éducative, du mieux vivre ensemble et de la qualité de vie, que ce soit auprès des jeunes ou des moins jeunes, des institutions scolaires, des centres de rétentions, ou des entreprises.

Lutter contre la souffrance au travail, prévenir les discriminations ou proposer aux jeunes en souffrance un chemin vers la résilience, participe pour moi de la même démarche : réunir, dans l’acte artistique, le créatif et le militant, viser l’éducatif. Faire ma part avec les outils qui sont miens : les mots, la représentation, l’incarnation des idées et des sentiments par les comédiens, le débat. Pour cela ne céder en rien à l’exigence artistique – c’est aussi considérer le public auquel on s’adresse que de lui proposer un spectacle de la même qualité que celui qui serait « spectacle d’art uniquement »

Mais ne jamais se départir de la fonction psychosociale du théâtre : susciter la catharsis, favoriser les échanges, créer du lien…